LES FOSSILES URBAINS

Une curiosité qu’on observe fréquemment dans le décor urbain, ce sont les traces bien concrètes qu’ont laissées les bâtiments anciens sur les édifices contemporains. Ce sont des fossiles urbains qu’une série de photographies permettra d’illustrer à partir d’un exemple localisé à la Place d’Youville à Montréal. Voici ce qu’on peut observer aujourd’hui sur un mur extérieur du 373, Place d’Youville.

Autrefois, cet emplacement était occupé par un bâtiment qui a laissé deux traces bien distinctes:

1)Aux trois quart de la hauteur du mur, un toit plat goudronné, au-dessous duquel on voit encore les vestiges des solives du toit,

2)Puis à la mi-hauteur, un toit en pente au-dessus duquel apparaissent encore les marques des solives du dernier étage de la maison à toit plat.

Sachant que les maisons à pignon sont normalement antérieures aux maisons à toit plat, on peut même dire qu’à cet emplacement, se sont succédé deux générations de bâtiments : un bâtiment à pignon et plus tard un autre, plus grand, à toit plat.


Observons maintenant une prise de vue plus large de la Place d’Youville afin de la faire coïncider avec quelques photographies anciennes provenant des archives de la ville de Montréal.


Si on en croit la photographie des années 1920 conservée aux archives de la ville de Montréal qui suit immédiatement, l'espace vacant affichant les fossiles était occupé non pas par un, mais bien par deux bâtiments contigus.


Un agrandissement de cette photographie d’époque le montre d’ailleurs plus clairement. De surcroît, la photo révèle également, sur leur gauche, le nom d’un commerce, le Rose & Laflamme, qui pourra servir à identifier les deux disparus à partir des Annuaires. Remarquez qu’il ne reste visible aujourd'hui que la cheminée en saillie qui monte le long du mur.


Examinons une autre photographie afin de dégager un nouveau détail. Il s’agit cette fois d’un cliché pris dans les années 1930 et également conservé aux archives de la ville de Montréal. La vignette qui l’accompagne identifie trois commerces dont l’un d’eux est le Mallinckrodt Chemical qu’on devine être celui immédiatement voisin à droite de nos deux disparus.


Fort de ces renseignements, la recherche dans les annuaires municipaux permet d’identifier aisément le nom des deux entreprises qui occupaient les bâtiments disparus. Il s’agit de droite à gauche de l’édifice occupé au 375 par la Wingate Chemical Co, qui disparaît des annuaires en 1960, et de celui de la Strong Cobb of Canada, sis au 383, et qui subit le même sort en 1962. Cet espace vacant a donc plus de 50 ans!

Nous vous souhaitons bonne chasse aux fossiles urbains!